François Génot, le témoin errant

François Génot est l’un des lauréats de l’opération «Boursiers mosellans à Berlin», un programme porté par le Conseil Général de la Moselle. Cette bourse lui a permis de partir en résidence durant un an et de sortir de sa tête un projet artistique intitulé Der Wanderer, le randonneur.

Réalisée dans la capitale allemande, il s’agissait pour l’artiste de se laisser aller à une traversée dessinée de la ville. Une balade composée d’éléments fondateurs qui font l’oeuvre du peintre: une installation de grands formats peints mêlant des éléments architecturaux, végétaux et sociaux. De retour en Lorraine, le Cadhame décide d’accueillir à la Halle Verrière de Meisenthal l’exposition qui est l’aboutissement des recherches berlinoises de l’artiste. Recherches qui ouvrent une nouvelle fenêtre de dialogue dans une démarche artistique déjà bien menée. L’œuvre présentée, et imaginée pour le lieu, s’intitule La Grande Traversée. Promenade guidée dans l’univers de l’artiste messin...
On perçoit l’artiste sensible à la photographie et au dessin. Protéiforme. On est associé au regard, celui qui se pose puis se concentre sur l’environne- ment quotidien. Romantique. On imagine le geste du peintre aimant à reproduire des motifs végétaux qui envahissent peu à peu tout. Précis. Il y a quelque chose de feutré, de terriblement poétique et d’un peu nostalgique aussi dans la peinture de François Génot. Il y a quelque chose d’évidement sensible mêlée à une espièglerie un peu enfantine: tant dans la représentation picturale de la végétation, son motif de prédilection, que dans des installations telles que Entrelacs (2005), un jeu de Mikado géant, ou encore celle qui l’a pensée actuellement pour la Halle Verrière de Meisenthal qui, à mi-chemin entre la sculpture et l’installation, est un ensemble de palissades que le visiteur doit franchir. Ou pas!? Il y a également une dimension que l’on pourrait ressentir comme orgueil- leuse: la peinture à l’huile de François Génot nous regarderait-elle avec malice quand elle nous montre la fragilité d’un monde – celui bâti par les hommes – mangé par la végétation? Une végétation faite de masses d’herbes denses et excluantes quand elles finissent par former une barrière physique ou psychologique... Elles sont le symbole de la vulnérabilité d’un monde qui ne fait que respecter le cycle immuable de la vie. Aucun homme ne saurait le contrer. Cependant, seul un artiste aujourd’hui semble encore pouvoir le souligner: sommes-nous devenus si naïfs pour penser que nos amas de briques et autres sarcophages de béton seront le témoin de notre passage !?
Dans ce huit-clos, le face à face entre l’oeuvre et le spectateur, qu’est-ce qui prévaut?
Le geste foisonnant du peintre. L’arrêt sur image de paysages métamorphosés. L’errance de l’artiste évoluant au hasard d’une ville qui elle-même ne sait pas bien où elle se rend. L’oeuvre de résidence de François Génot est une jolie allégorie. Elle pourrait faire écho à l’actualité brûlante de notre monde en train de se perdre mais qui est surtout un beau geste de liberté d’un artiste décidant d’errer sciemment, sans rien attendre ou presque. Un processus qui pousse à la surprise faite au détours de quelques pas. Le résultat de cette démarche est à découvrir du 16 novembre au 23 décembre. Si toutefois, vous décidez vous aussi d’emprunter le sentier esquissé par François Génot.

Nadège Moreau

 

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